Après Bamako et Dakar, la capitale économique ivoirienne accueille vendredi un débat public de la Deutsche Welle sur les migrations, dans un contexte marqué par des drames à répétition.
« Partir ou rester, les jeunes Africains en quête d’avenir », c’est le titre du projet porté par la radio internationale allemande, avec le soutien du ministère allemand des Affaires étrangères. A Abidjan, c’est devant un panel de membres du gouvernement, d’universitaires et d’activistes de la société civile ivoirienne que sera discutée la question migratoire. Le débat a lieu à l’Institut Goethe, le centre culturel allemand d’Abidjan. La problématique est d’actualité. Pas un jour ne passe sans que l’on n’entende parler de bateaux de migrants secourus en Méditerranée.
« Personne ne veut que des jeunes meurent dans le désert ou dans la Méditerranée »
Depuis le début de l’année, quelque 50.000 personnes ont débarqué sur les côtes italiennes. Celles-ci ont eu de la chance. D’autres pas. Au large de la Libye, ce sont plus de 1500 migrants qui ont perdu la vie depuis janvier 2017. Des centaines parmi eux sont originaires d’Afrique sub-saharienne. Face à ces tragédies, la Deutsche Welle ne cache pas son objectif. Dirke Köpp est la directrice du service francophone :
« Notre projet s’inscrit dans la lutte contre l’immigration irrégulière. Personne ne peut empêcher la migration. L’homme migre, c’est normal, il l’a toujours fait, mais personne ne veut que des jeunes meurent dans le désert ou dans la Méditerranée. Donc ce débat a pour objectif de mettre le couteau dans la plaie, afin de voir pourquoi les jeunes Ivoiriens partent et dans quelles conditions ils vivent une fois qu’ils sont en Europe. »
La Côte d’Ivoire est historiquement connue pour être une terre d’immigration. Au début des années 1960, le pays comptait 25% d’étrangers sur son sol. Mais la situation a changé. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire est devenue une terre de départ. Selon un rapport du ministère italien de l’Intérieur, entre janvier et février 2017, 839 ressortissants ivoiriens sont arrivés en Italie par la mer.
Manque d’alternatives pour les jeunes
Les raisons de cet exode sont autant au niveau politique qu’économique. Francis Akindes est professeur de sociologie à l’université de Bouaké, en Côte d’Ivoire :
« La donne a changé, les possibilités d’accès à un revenu se rarifient et les premières victimes sont les jeunesle premières victimes sont les jeunes. Parfois ils décident de partir en famille, et alors père, mère et enfants meurent en mer. C’est dramatique. Mais qu’est-ce qu’on propose comme alternative à la prise de risque aux jeunes ? Pas grand chose. Beaucoup de discours et de promesses. Entretemps, ces jeunes ont besoin d’exister. Mais comment exister lorsqu’on n’a pas les ressources ! »
L’OIM aide au retour
Selon l’Organisation internationale pour les Migrations (OIM), de 600.000 à 900.000 migrants sont actuellement en Libye. Leur intention de rejoindre l’autre rive de la méditerrannée n’est pas exclue. Mais l’organisme onusien en charge des questions de migrations apporte son soutien à ceux qui veulent retourner dans leur pays. Michele Bombassei est spécialiste de l’assistance aux migrants pour l’Afrique de l’Ouest, à l’OIM. « Pour le mois de Juin, nous avons prévu sept vols, avec 170 personnes par vol, vers le Sénégal la Gambie, la Guinée-Conakry, la Gambie, le Nigeria et la Côte d’Ivoire. Notre but est de rendre leur réintégration durable. Si on ne rend pas la réintégration durable, il y aura le risque qu’ils décident d’émigrer à nouveau.»
Même si certains acceptent de rentrer, d’autres continuent de rêver d’ailleurs, quels que soient les moyens d’y arriver. Partir ou rester ? Réponse ce vendredi à Abidjan.